Les protéines et le végétarisme

Je précise que le titre fait référence au végétarisme au sens large, c’est-à-dire autant à l’ovo-lacto-végétarisme qu’au végétarisme strict (ou végétalisme).

J’ai mis du temps à écrire cet article sur les protéines, car je pensais sincèrement que désormais, tout le monde savait qu’il y a des protéines dans les végétaux, et que -spoiler alert!- il n’y a pas besoin de viande pour avoir la quantité de protéines dont nous avons besoin, quel que soit notre âge et notre activité physique.

Il semblerait que j’ai largement surestimé le niveau de connaissance actuel, et je me décide à rédiger cet article après deux informations que j’ai trouvées assez alarmantes:

  • une maman végétarienne m’a consultée dans le cadre de la diversification alimentaire de son bébé. Sa pédiatre lui avait dit que si elle refusait de donner de la viande à son enfant, elle alerterait les services sociaux!
  • une amie, végane et maman, m’a raconté qu’il y a quelques années, elle avait voulu consulter une diététicienne durant sa grossesse afin d’être certaine de « faire les choses bien ». La diététicienne en question ignorait totalement l’existence de protéines dans les aliments végétaux. C’est finalement mon amie qui s’est retrouvée à apprendre des choses à la professionnelle de santé.

I- Qu’est-ce que les protéines?

Les protéines peuvent être comparées à un collier de perles: les perles s’appellent les acides aminés. Les acides aminés se combinent entre eux de façon à former des chaînes que l’on appelle des peptides, et ces chaînes s’assemblent entre elles de façon à former les protéines.

Partons de la base: les acides aminés. Il en existe 20 différents et sur ces 20 acides aminés, 9 sont dits « essentiels » car notre organisme est incapable de les synthétiser lui-même. Nous avons donc besoin de les trouver dans notre alimentation.

Lors du processus de digestion, les liaisons qui relient les acides aminés entre eux sont cassées. Nous absorbons donc des acides aminés, et non directement des protéines. Les protéines sont des molécules trop grosses pour passer telles quelles à travers les parois intestinales.

A partir de ces acides aminés, notre organisme construit les protéines dont il a besoin pour fonctionner: à partir des perles que nous lui avons fournies, il créé un nouveau collier dont le motif et l’assemblage est différent du collier d’origine.

II- Trouve-t-on tous les acides aminés essentiels dans une alimentation végétale?

La réponse est oui!

Selon les aliments, la quantité de tel ou tel acide aminé peut varier. Certains aliments ne contiennent pas, à eux seuls, la quantité journalière recommandée d’un des acides aminés essentiels.

C’est le cas dans les céréales, noix et graines qui contiennent de la lysine en assez faible dose, et des légumineuses qui contiennent assez peu de méthionine.

En ayant simplement une alimentation variée, cela ne pose aucun problème et la balance de lysine et de méthionine s’équilibre parfaitement.

III- J’ai entendu dire qu’il fallait absolument combiner céréales et légumineuses pour que les protéines soient complètes.

Cette idée de « protéines incomplètes » et de « nécessité de combiner les protéines végétales » remonte à 1975 et a été totalement réfutée par la communauté scientifique depuis. Toutefois elle reste bien ancrée dans l’imaginaire collectif.

Il se trouve que le corps est intelligent et qu’il est capable de stocker des acides aminés libres, qu’il sera en mesure d’utiliser plus tard. Par conséquent, il n’est pas absolument nécessaire de combiner céréales et légumineuses sur chaque repas, même si vous pouvez choisir de le faire: les associations comme le couscous aux légumes ou le chili sin carne sont absolument délicieuses!

Par ailleurs, il existe des aliments dans lesquels la proportion de tous les acides aminés essentiels est idéale pour l’humain: c’est le cas du soja, du quinoa ou encore du chanvre.

Enfin, notre corps est capable de recycler ses protéines: environ 90 grammes de protéines en provenance de notre propre corps sont déversées chaque jour dans notre tube digestif pour y être réduites en acides aminés qui seront réabsorbés et réutilisés. Inutile, donc, de vous prendre la tête à calculer si vos apports en acides aminés seront couverts: votre corps fait le travail pour vous, et il n’y a que si vous avez un déséquilibre chronique sur une très longue période que cela deviendra problématique.

Il est quasi-impossible d’avoir une alimentation suffisante en calories qui serait déficiente en protéines.

IV- De combien de protéines ai-je besoin?

Le besoin de référence de base pour un.e adulte est de 0,8 gr de protéines par kilo de poids de corps et par jour. Par exemple, un.e adulte de 70 kg a besoin d’une moyenne de 56 gr de protéines par jour.

Pour les personnes sportives en prise de masse musculaire, au cas par cas, on peut recommander entre 1gr et 1,5 gr de protéines par kilo de poids de corps et par jour. Sur de courtes périodes, pour certains entraînements bien spécifiques,, on peut pousser jusqu’à 2 gr de protéines par kilo de poids de corps et par jour.

Chez les enfants, les apports recommandés sont de 10 gr de protéines par jour de 0 à 2 ans, de 12 gr par jour de 2 à 3 ans, puis comme pour les adultes, de 0,8 gr de protéines par kilo de poids de corps et par jour.

Je précise que pour les nourrissons, le lait maternel couvre tous les besoins en protéines, tout comme les laits infantiles qu’ils soient à base de lait de vache ou de lait végétal. En revanche, on ne donne pas à un nourrisson un lait non maternisé (que ce lait soit animal ou végétal).

Pour les personnes âgées, il est recommandé de passer à une consommation d’environ 1 gr de protéines par kilo de poids de corps et par jour (soit, pour une personne de 70kg, 70 gr de protéines par jour) pour compenser la perte musculaire. Cela va avec le maintien d’une activité physique régulière, car la consommation protéique à elle seule ne permet pas de construire du muscle.

V- Est-il possible de consommer trop de protéines?

Oui, il est possible de consommer un excès de protéines, et cela est néfaste pour la santé.

Lors du « découpage » des protéines en acides aminés pendant la digestion, le squelette protéique qui reliait les acides aminés entre eux est éliminé en tant que déchet de la digestion. Ce squelette azoté est acidifiant pour l’organisme, et en excès cela peut provoquer des troubles de type calculs rénaux.

On a malheureusement pu le constater à de nombreuses reprises lorsque le régime Dukan, qui prônait une consommation quasi-exclusive de viandes, oeufs et laitage sur une longue période était à la mode: les personnes qui suivaient ce régime perdaient dans un premier temps beaucoup de poids très rapidement. Mais si elles maintenaient ce régime, des problèmes rénaux se déclenchaient rapidement.

Par ailleurs, l’organisme est en mesure de stocker tous les nutriments sous forme de graisse. Par conséquent, si vos apports en glucides et en lipides sont satisfaisants, mais que vous consommez trop de protéines, elles seront, elles aussi, stockées en graisses. Le cas du régime Dukan ne fonctionne que parce que l’apport en glucides est coupé et que l’on pousse ainsi l’organisme à fonctionner « en mode dégradé », ce qui n’est pas souhaitable pour une alimentation équilibrée.

Les protéines végétales sont meilleures pour l’organisme car la présence de calcium et de magnésium (basifiants) dans la plupart des sources végétales de protéines équilibrent l’apport en azote acidifiant.

Actuellement, dans les pays occidentaux notre consommation protéique est largement en excès, notamment en protéines d’origine animale. La consommation de viande en 1900 en France était de 19 kg de viande par an et par personne. En 2019, elle s’élevait à 87,5 kg par an et par personne!

Les recommandations de l’ANSES sont de ne pas dépasser une consommation de 500 gr de viande par semaine. Avec ces quantités, nous sommes à plus de 3 fois les recommandations sanitaires.

Ceci est d’autant plus inquiétant lorsqu’il s’agit de la santé des enfants puisque la grande majorité des cantines scolaires ne se conforme pas à ces recommandations:

VI- Quels aliments contiennent des protéines?

Quasiment tous, sauf la gélatine et les sodas.

Sérieusement, les protéines se retrouvent partout, même dans les légumes (oui, oui!). Cependant, comme ces derniers ne sont pas très calorifiques, la quantité de protéines qu’ils contiennent est assez faible.

Les aliments les plus riches en protéines sont les légumineuses, les céréales et les graines et noix.

Par céréales, j’entends tout ce qu’on appelle les féculents (pas les céréales du petit-déjeuner!): riz, pain, pâtes, épautre, avoine, millet, etc.

Les légumineuses comprennent les lentilles, les pois, le soja, le lupin, toutes les sortes de haricots sauf les verts et tous les produits à base de soja (tofu, tempeh, PST, etc.)

Enfin, dans la catégorie noix et graine, on retrouve toutes les différentes sortes de noix (macadamia, pécan, cajou, du Brésil…), les amandes, les noisettes, pignons de pin, pistache, etc.

Comme vous le voyez, les listes sont longues et elles sont non-exhaustives.

En conclusion, si vous souhaitez passer à une alimentation végétale, ou que vous êtes déjà en début de végétarisme ou de véganisme, vous n’avez aucune crainte à avoir concernant votre apport protéique.

La fameuse « carence en protéines » est un mythe, certes bien tenace, mais un mythe tout de même. Tant que vous mangez à votre faim, vous ne manquerez pas de protéines.

Sources:

ANSES

Nutritionfacts.org

Vidal.fr

Association Végétarienne de France

3 commentaires sur “Les protéines et le végétarisme

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